Aujourd’hui, je te propose une randonnée avec une nuit dans un véritable nid d’aigle : un igloo à près de 3300 m d’altitude.
Accès au refuge des Pantalons Blancs : quelques inconnues…
Avant de prendre la décision de m’accompagner, je dois te prévenir de quelques inconnues :
- Je sais qu’il a neigé récemment sur les sommets, mais je ne connais pas précisément les conditions d’enneigement sur l’itinéraire pour atteindre l’igloo.
- Je n’ai pas réservé et il n’y a que 15 places disponibles. Peut-être n’y aura-t-il pas de place pour nous ?
- Il y a environ 5 heures de marche jusqu’au Pantalons Blancs, sur un sentier apparemment mal tracé et un dénivelé total de près de 1300 m depuis le parking du barrage de la Grande Dixence.
Alors, dans ces conditions, es-tu encore partante ou partant pour cette nouvelle aventure ?
Ok, si ces quelques contraintes ne t’ont pas dissuadé, c’est parti.
Vérifications d’avant randonnée
En premier lieu, sache que j’ai déjà vérifié la météo : ces deux prochains jours s’annoncent ensoleillés, sans précipitation, avec une limite du 0°C aux environs de 4000 m. Cela devrait nous assurer des températures positives sur l’ensemble du parcours.
Pour ce qui est de l’itinéraire, il est clair pour la première partie du parcours, jusqu’au lieu-dit la Barme (2458 m).
Après cet endroit, il s’agit de suivre l’arrête des Rochers du Bouc, mais aucun chemin n’apparaît sur la carte. Je sais cependant que le refuge est accessible par cet itinéraire : un collègue a emprunté cet itinéraire pour monter au refuge. Sur place, il devrait donc être possible de trouver le chemin, même s’il devait être mal tracé. À voir…
Ok, maintenant que météo et itinéraire sont plus ou moins clair, nous pouvons passer à la préparation du matériel. J’utilise pour cela ma méthode checkbox que je te présente plus en détail dans un autre article (à venir).
Et si tu souhaites, toi aussi, préparer tes randonnées sans rien oublier d’essentiel, je t’ai concocté un programme gratuit dans lequel je couvre le sujet. Tu peux y participer dès maintenant !
Barrage de la Grande Dixence au son du cors des Alpes
Paaarfait, nous voilà maintenant prêt à nous mettre en route, direction le barrage de la Grande Dixence (le plus haut barrage poids du monde), au fond du val des Dix (ou val d’Hérémence sur la carte).
Comme ce n’est pas encore la pleine saison estivale, il y a de la place sur le parking (2100 m) du lieu de départ de cette rando.
Arrivé à la hauteur du téléphérique, le son du cor des Alpes retentit à mes oreilles. C’est vrai que nous sommes dimanche, il y a de l’animation sur la place du Chargeur, devant le restaurant-hôtel du Ritz. Touristes, kiosque à souvenirs, cartes postales et raclette, tout y est 😉
Depuis le pied du barrage, la première étape consiste à regagner le couronnement de la Grande Dixence. Plutôt que de gravir ces 270 premiers mètres de dénivelés à pied, tu peux choisir l’option de la montée en téléphérique. Et hop, une demie-heure d’effort de gagné !
Pour ma part, je préfère grimper à pied. Cela me permet d’avoir une pensée pour les héros, dont mon grand-père a fait partie, qui ont construit ce monstre de béton entre 1953 et 1961. À cette altitude, les conditions de travail étaient si rudes que le mot héro me semble le mieux adapté.
Le long du Lac des Dix
L’étape suivante du parcours consiste à suivre la route carrossable qui longe le Lac des Dix. Tu peux ainsi prendre la mesure du volume de cette retenue d’eau qui s’étend sur près de 5 km.
Il s’agit d’un parcours à plat, agrémenté de quelques tunnels qui apportent leur lot de fraîcheur sur le chemin.
À la sortie du dernier tunnel, tu peux mieux apprécier le fond de vallée avec ses sommets à la blancheur éternelle. Tu peux également mieux admirer la première partie de l’arrête des Rochers du Bouc que nous allons suivre jusqu’au Pantalons Blancs. À défaut d’un chemin parfaitement tracé, cela nous donne une idée de direction.
Arrivé dans la région de la Barme, notre échauffement prend fin. Les choses sérieuses commencent. Actuellement à un peu plus de 2400 m d’altitude, il s’agit pour nous de monter jusqu’à 3290, altitude de l’igloo. Un bel effort en perspective dans un terrain à rochers… et peut-être également enneigé. Vu la blancheur des sommets environnants, cela ne serait pas étonnant.
Montée par les Rochers du Bouc : une rando alpine
La première priorité reste de trouver le sentier. Ce sera chose faite, juste un peu en dessus de la Barme. Y figurent de grandes inscriptions fléchés, avec la mention « igloo ». Le sentier est balisé blanc-bleu-blanc, ce qui signifie sentier de randonnée alpine.
Les marquages sont peu nombreux et, sur la montée, je perds la trace du chemin à plusieurs reprises. Cela reste cependant tout à fait gérable, la direction étant clairement donnée par l’arrête elle-même.
Suivre le sentier permet cependant de minimiser les efforts à fournir. Et ce n’est pas négligeable dans ce terrain physiquement éprouvant. Je te recommande donc de mettre l’accent sur l’observation plutôt que de foncer tête baissée.
Une arrête interminable…
Pffff, à chaque fois que je crois avoir atteint le point culminant, un nouveau point haut apparaît à l’horizon. Cette arrête me semble interminable. Je suis fatigué et n’ai qu’une idée en tête : arriver à la cabane et prendre un bon bain chaud 🤣
À chaque fois que je pose ma main sur un rocher, sa chaleur accumulée par l’exposition au soleil contraste avec la fraîcheur de l’air ambiant. Étonnant et déroutant !
Après ces premières heures d’effort, enfin j’aperçois quelques bâtiments. Quel soulagement d’apercevoir enfin l’igloo qui joue à cache-cache avec la brume de ce début de soirée. Même s’il reste encore passablement de chemin à parcourir, j’aperçois au moins, maintenant, mon objectif.
Igloo des Pantalons Blancs en vue !
Après quelques passages à chaînes et franchissements enneigés, sur lesquels j’enfonce parfois jusqu’aux genoux, voilà la cabane bien en vue. Il ne reste plus que quelques mètres pour l’atteindre.
Apparemment, je ne serai pas seul pour cette nuit. J’ai pu observer deux personnes sur le pas de porte durant mon approche. Un peu de compagnie me convient très bien dans cette endroit isolé.
Le lieu ressemble à un micro village de montagne. Il y a l’igloo (3290 m), qui sert de refuge, une cabane avec les WC ainsi qu’une seconde cabane qui sert de réduit. Le panorama doit être splendide par temps dégagé mais dans les conditions de brouillard de cette fin de journée, pas moyen d’en profiter. Peut-être que demain…
À l’intérieur… je ne suis pas seul !
Bon, il est temps de pénétrer dans ce fameux igloo tant attendu. Et de faire connaissance avec mes compagnons de dortoir.
Il s’agit de Bas et Michiko, un couple arrivé tout droit des Pays Bas. En vacances dans la région, ils ont prévus quelques jours de trekking en autonomie. Pour leur première nuit, ils ont choisi une halte aux Pantalons Blancs. Imagine : ils viennent de quitter un pays plat pour se retrouver à passer la nuit dans un nid d’aigle à près de 3300 m d’altitude. Quel contraste !
À l’intérieur, la température est très agréable. Elle contraste avec la fraîcheur extérieure. À défaut du bon bain chaud dont je rêvais, je m’en contenterais 😂
Cet abri est super bien emménagé, tout en rondeur.
D’un côté, quelques tables et tabourets habillent la partie jour. De l’autre, quinze couchettes pour la partie nuit. Au milieu, le poêle à bois, maître des lieux. Il permet à la fois de chauffer et de cuisiner.
Dans le coin cuisine du centre se trouvent également un réchaud à gaz deux feux ainsi que des casseroles, assiettes, couverts et… un caquelon à fondue, bien sûr ! J’adore la vision de ces louches et autres linges qui pendent sur les cordons de séchage. Tout une ambiance.
Si je devais revenir une fois en ces lieux, j’emporterai assurément de quoi faire une fondue. En attendant, je me contente d’une bonne soupe et de quelques olives. Hummm, revigorant à souhait !
Les WC : toute une expérience 😂
Avant de m’installer pour la nuit, il me reste encore un petit rituel à accomplir. C’est parti, direction la cabane WC. Là, je t’avoue que je suis scotché par l’expérience.
Premièrement, en entrant dans les WC, ça sent vraiment bon ! Si, si, je t’assure, une bonne odeur de bois. Le bois de la cabane en elle-même et également la matière qui sert de litière à ces toilettes sèches.
Deuxièmement, ce que je crains le plus en allant aux toilettes dans un endroit frais, c’est de m’asseoir sur une lunette glacée. Or, là ce n’est pas du tout le cas. La lunette et la cuvette sont en matière isolante, un genre de sagex. Aucune sensation de froid. Même à la maison la lunette est plus fraîche. Magique je te dis 🤣
Ce moment agréable de soulagement prépare en douceur une bonne nuit de sommeil. Avec la chaleur qui règne dans la cabane, je n’imagine pas me glisser dans mon sac de couchage. Je l’utilise uniquement comme couverture et c’est déjà plus que suffisant.
Le lendemain matin, le brouillard s’est levé, le ciel est dégagé. L’occasion de contempler les magnifiques couleurs du lever de soleil qui embrase les sommets avoisinants.
Au petit matin…
De la neige pour faire de l’eau
Nourri par ces premiers rayons du soleil, il est temps de donner à manger à ce bon vieux poêle à bois qui me fait de l’œil. Entre le carton pour allumer le feu, le petit bois et des bûches plus grosse, tout est à disposition. Après l’expérience de la cabane du Prabé, j’apprécie ce luxe à sa juste valeur.
Une fois le feu bien lancé, je profite de sa chaleur pour faire fondre de la neige, seul moyen d’avoir de l’eau dans ce refuge. Je m’aperçois rapidement et concrètement à quel point faire fondre de la neige est gourmand en énergie. Si j’ai bien réussi à la faire fondre, à grand renfort de tourniquets à la spatule, l’eau reste bien froide. Nous devrons utiliser le gaz pour réussir à la faire bouillir.
Une fois les gourdes remplies et les affaires rassemblées, nous voilà tous les trois prêts pour la descente.
Je partage une partie de la descente avec Bas et Michiko. Nous nous séparons juste au-dessus de La Barme. Notre rencontre éphémère s’arrête ici. Eux poursuivent leur périple pour deux jours encore, direction le col des Roux (2804 m) puis la cabane de Prafleuri (2663 m) dont je leur ai vanté le délicieux petit déjeuner. Peut-être vont-ils tout de même s’arrêter en cabane alors qu’ils avaient initialement prévu un bivouac. Ah les petits gourmands 😂
Quant à moi, je retourne à la voiture, puis au camp de base qui me sert d’habitation, pour préparer la prochaine sortie.
Les leçons de cette randonnée et nuit en refuge
Sac de couchage ou non ?
Il est généralement inutile d’emporter un sac de couchage lorsque tu vas dormir dans une telle cabane. C’est généralement le cas pour les cabanes du CAS, le club alpin Suisse.
Trop habitué jusqu’ici à randonnée en autonomie, c’est vrai que je n’y ai pas pensé. La cabane disposait de couvertures que j’aurais pu utiliser. Vu la chaleur dans le refuge, cela aurait été amplement suffisant, même s’il faisait un peu plus frais au petit matin.
Avant de te rendre dans une cabane, vérifie donc sur son site Internet, pour peu qu’une page lui soit dédiée, si des couvertures sont à disposition. Si c’est le cas, tu peux simplement emporter un petit drap-sac en soi, communément appelé « sac à viande » qui remplit un rôle hygiénique.
Choisir un sac à dos adapté
Le sac à dos que j’ai emporté était un peu juste par rapport à la charge. Du coup le dos du sac, non renforcé, était un peu déformé, arrondi. Pas très agréable à porter.
De manière générale, le sac n’était pas très stable. De plus les bretelles, un peu fine, s’incrustaient dans mes épaules.
Bon, ce n’était pas dramatique, c’est simplement que j’ai généralement l’habitude de plus de confort. À choisir, je repartirai avec un sac mieux adapté. Ou alors je le chargerai moins, comme mentionné ci-dessus.
Acclimatation : attention au MAM
En soirée, Bas souffrait de maux de tête. Les douleurs s’étaient amplifiés le lendemain matin. Certainement qu’il souffrait du MAM, le mal aigu des montagnes.
Pas étonnant, : il est passé en peu de temps des Pays Bas, à environ 0 m d’altitude, à une nuit en cabane à près de 3300 m. Une meilleure idée aurait été de laisser le temps au corps de s’acclimater à l’altitude.
Un bon principe à observer en montagne est la règle du « monter haut et dormir bas ».
Elle consiste à monter sur les hauteurs en journée afin d’habituer ton corps à l’altitude. En fin de journée, tu regagnes une altitude inférieure pour dormir. Cela te permet de passer une nuit confortable.
Ainsi, lorsque tu pars sur une randonnée pour plusieurs jours, en début de séjour, évite de dormir sur un col ou un sommet.
En franchissant ces points hauts, ton corps va s’habituer petit à petit à l’altitude. En dormant plus bas, tu as toutes les chances de dormir confortablement et d’éviter ainsi les désagréments d’une nuit en altitude. Même si il n’y a pas de garantie absolue 😉
De neige à eau bouillante ?
Faire bouillir de l’eau à partir de la neige consomme du temps et beaucoup d’énergie.
Si tu as le choix, il est préférable de récolter directement de l’eau à faire bouillir plutôt que de la neige. D’autant plus que les ressources en gaz sont précieuses à cette altitude.
Pense donc à renouveler ton stock d’eau soit avant, soit après un refuge ou un lieu de bivouac dans la neige. Au moins lorsque c’est possible 😉
Informations pratiques
Région
Suisse > Valais > Sion > Val des Dix > Grande-Dixence
Accès en transport public et voiture
En transport public : bus 372 au départ de Sion, gare/poste, en direction de Dixence, Le Chargeur. Descendre à l’arrêt Dixence, Le Chargeur. Voir les horaires sur le site des CFF.
En voiture : parking gratuit en-dessous de la gare avale du téléphérique. Accès au point de départ de la randonnée.
Infos et carte de l’itinéraire suivi
Durée : | 6h10 | Point haut : | 3299 m |
Distance : | 14.6 km | Point bas : | 2098 m |
Dénivelé + : | 1404 m | Difficulté : | T4 – randonnée alpine |
Dénivelé – : | 1404 m | Boucle : | Non |
Où dormir, manger, se désaltérer… ?
- Restaurant-hôtel du Barrage (2140 m), lieu de départ et d’arrivée de la rando
- Refuge de la Barmaz (2460 m), au pied de de l’arrête des Rochers du Bouc
- Cabane des Ecoulaies (2475 m), au pied de de l’arrête des Rochers du Bouc, direction le col des Roux
- Refuge-igloo des Pantalons-Blancs (3280 m), le but de cette rando
À faire, à voir dans les environs
- Visite guidée du barrage de la Grande Dixence
- Tyrolienne Alpinline
Variante pour les familles
La balade le long du Lac des Dix est facilement accessible, en téléphérique. Le parcours est à plat, à travers des tunnels qui donne un aspect aventure à la sortie. Un chemin facile, accessible avec poussette, qui permet d’accéder à de magnifiques paysages alpins.
Conseils et recommandations
Il s’agit d’une randonnée alpine avec marquage blanc-bleu-blanc. Le chemin n’est pas très bien tracé, sur une arrête avec rochers et neige selon la saison.
Cet itinéraire présente certains passages vertigineux, équipés de chaînes. À éviter si tu souffres de vertige !
Le refuge, bien que non gardienné est géré par le club alpin suisse (CAS), plus précisément par la section de Sion du CAS. Sur place il y a du bois, du gaz, des couvertures, services, casseroles…
La cabane est très bien aménagée avec des WC au top et la possibilité de faire du feu.
La cabane est toujours ouverte, même en hiver et il est possible de réserver sur le site du CAS pour être sûr d’y avoir ta place. La réservation est dans tous les cas nécessaire pour les groupes. Tu peux également voir, sur le site, le degré d’occupation du refuge.
Tu trouves plus d’infos sur le refuge-igloo des Pantalons Blancs sur le site de la section sédunoise du club alpin.
Bon séjour ☀️
Edith
Joli rando. Et cet igloo me semble impressionnant, j’aimerais beaucoup y faire une escale
Nicolas
En effet, ça vaut vraiment le coup, j’ai adoré cette rando et ce séjour dans ces paysages fabuleux… Bon séjour ☀️